Jeanne Mance est née le 12 novembre 1606 à Langres, ville située sur un plateau abrupt au nord-est de la France, entre la Champagne et la Bourgogne. Deuxième d’une famille bourgeoise de 12 enfants, elle fut une des premières élèves des Ursulines venues enseigner à Langres en 1613. Au décès de sa mère, lorsqu’elle a 20 ans, elle a à cœur d’aider sa famille et le cabinet juridique de son père. En 1635, pendant la guerre de Trente Ans, Jeanne apprend à soigner toutes sortes de blessures. Jusqu’en 1640, elle s’occupe aussi des victimes de la peste qui ravage la ville de Langres. C’est son cousin, Nicolas Dolebeau, qui le premier lui parle de la Nouvelle-France et lui donne l’envie de suivre les traces des premières Ursulines et Augustines qui étaient parties s’installer à Québec.
Elle part pour Paris en 1640, où elle rencontre de nombreuses femmes fortunées : Anne d’Autriche, la régente et mère du futur Louis XIV, et surtout Angélique Faure, veuve de Claude de Bullion, qui l’incitera à fonder un établissement hospitalier en Nouvelle-France, l’assurant de son soutien financier indéfectible. C’est en mai 1641 que deux bateaux ayant à leur bord Paul Chomedey de Maisonneuve, pour l’un, et Jeanne Mance, pour l’autre, avec une quarantaine de colons répartis dans les deux embarcations, quittent le port de La Rochelle en direction de la Nouvelle-France. Après une traversée de trois mois, le navire où se trouve Jeanne Mance atteint Québec en août 1641, alors que celui de Maisonneuve n’accoste qu’en septembre en raison de tempêtes.
Ils passent l’hiver à Québec, puis remontent le Saint-Laurent et atteignent l’île de Montréal le 17 mai 1642. Le lendemain, soit le 18 mai 1642, ils fondent Ville-Marie. Jeanne Mance se met alors à l’œuvre pour organiser la vie de la première communauté. Elle se fait intendante en organisant le quotidien. Jeanne fait construire un hôpital très sommaire en 1645, mais à l’été 1651, M. de Maisonneuve, découragé de voir sans cesse tomber des colons qu’il avait pour mission de protéger, se décide à aller chercher du renfort, et part pour la France recruter une centaine d’engagés grâce à une somme prévue pour l’Hôtel-Dieu. L’arrivée de ce groupe en 1653 permet à Montréal de survivre.
Jeanne Mance soigne sans relâche dans une installation précaire avant de s’installer dans un modeste bâtiment, inauguré le 8 octobre 1645. Trop petit, il est remplacé par un nouvel édifice en 1654. Jeanne Mance, laïque, est secondée pour le fonctionnement de l’Hôtel-Dieu par les Sœurs Hospitalières de Saint-Joseph qu’elle va elle-même chercher en France en 1659. En 1662, Jeanne effectue son dernier voyage en France pour assurer la substitution à la Société Notre-Dame de Montréal, démissionnaire, de la Compagnie des Prêtres de Saint-Sulpice, qui devient seigneur-propriétaire de l’île de Montréal. M. de Maisonneuve est rappelé en France en 1665, et Jeanne continue néanmoins à œuvrer à l’Hôtel-Dieu avec l’appui des prêtres de Saint-Sulpice.
Le 30 juin 1672, lorsqu’on entreprend la construction de la première église de Ville-Marie, Jeanne Mance est présente avec les représentants civils et religieux de l’époque. Elle y pose la cinquième pierre angulaire. Ce sera sa dernière apparition officielle. Elle s’éteint le 18 juin 1673.
Jeanne Mance, femme laïque, totalement dévouée à l’accompagnement des malades, eut une vision politique aussi ferme qu’avant-gardiste. C’est grâce à sa détermination, son courage et son intelligence que Montréal fut créée.
C’est Jérôme Le Royer qui fait venir les Religieuses Hospitalières de Saint-Joseph (RHSJ) établies en France pour s’occuper de l'Hôtel-Dieu construit à la demande de Jeanne Mance. À la mort de Jeanne Mance en 1673, l’Hôtel-Dieu est confié aux Sulpiciens, seigneurs de Montréal, et en 1676 aux Hospitalières, et ce, jusqu’en 1973. C’est en cette même année que les Hospitalières créent la Fondation Jeanne-Mance qui aura comme objectif de venir en aide à des œuvres caritatives et sociales.
En 2014, les autorités religieuses des RHSJ décident de finaliser les démarches entreprises avec le père Fernand Patry pour transmettre définitivement la Fondation Jeanne-Mance à une nouvelle administration et direction sous sa gouverne.
En 1642, mademoiselle Jeanne Mance porte en son cœur le désir profond de soigner le corps et l’âme des nouveaux arrivants de la Nouvelle-France et des peuples autochtones. En tant que cofondatrice de Montréal, Jeanne Mance a non seulement œuvré à la croissance d’une cité, mais elle a aussi permis l’éclosion d’une communauté de femmes engagées dont la vocation a toujours été de soulager la souffrance et de veiller à la réalité spirituelle et religieuse des malades.
Les Religieuses Hospitalières de Saint-Joseph ont accordé leur confiance au père Fernand Patry et lui ont remis les clés de la Fondation Jeanne-Mance pour qu’il perpétue l’œuvre entreprise et lui permette de prendre un nouvel essor. Depuis plus de trente ans, le père Patry se préoccupe de la souffrance humaine, de la maladie, de la mort et de l’accompagnement en fin de vie. Au cours des seize dernières années, son engagement au CHUM et à l’Hôtel-Dieu de Montréal lui a permis de peaufiner son approche d’accompagnement. Pendant cette même période, il a exercé la fonction d’aumônier auprès des Hospitalières à la résidence Marie-de-la-Ferre.
Si les objectifs initiaux de la Fondation Jeanne-Mance étaient de venir en aide à des œuvres caritatives, ceux-ci sont tournés aujourd’hui vers un besoin tout aussi pressant que criant, celui de l’accompagnement en fin de vie. Ainsi, l’inspiration du souffle prophétique de Jeanne Mance se perpétue par cette deuxième naissance de la Fondation Jeanne-Mance.
Fort de l’expérience acquise, le père Patry voit une similitude entre l’attitude de Jeanne Mance, qui soignait des malades de toute condition, qu’ils soient amis ou ennemis, soldats ou simples colons, et l’attitude d’aujourd’hui à se préoccuper de la fin de vie dans un esprit d’universalité et à recevoir un accompagnement professionnel. Cet accompagnement touche autant le malade que ses proches ainsi que les soignants en soins palliatifs. La préoccupation de Jeanne Mance peut continuer à se répandre partout au Québec.
Le 10 décembre 2015, la Loi concernant les soins de fin de vie est entrée en vigueur au Québec. Sous le thème « mourir dans la dignité », la Loi permet aux citoyens, peu importe où ils habitent, d’avoir accès aux soins palliatifs et à un accompagnement de fin de vie. Avoir accès à des soins palliatifs et à un accompagnement professionnel de fin de vie dans une maison spécialisée ou à domicile est maintenant un droit. Cet accompagnement peut être teinté par l’humanisme, la spiritualité ou les rites religieux correspondant aux croyances et à la volonté de la personne en fin de vie. Dans l’avenir, les demandes d’accompagnement de fin de vie sont appelées à croître en fonction de l’accessibilité grandissante des soins palliatifs. Étant donné que l’accompagnement de fin de vie est rarement financé par le ministère des Services sociaux et de la Santé, la Fondation Jeanne-Mance portera continuellement cette cause sur la place publique. Elle veut être active dans l’élaboration d’approches d’accompagnement de fin de vie professionnelles et respectueuses des personnes. La Fondation prendra également les moyens pour faciliter et élargir l’accessibilité aux services d’accompagnement.